CE QUE DIT LA BOUCHE

 Réflexion sur l’Évangile du dimanche et des Fȇtes 

               Année C -VIII Ordinaire (Lc 6, 39-45)                                                       

par André De Vico, prêtre

correction française: merci à mes amis   

 

 

      “L’homme bon tire le bien du trésor de son cœur qui est bon; et l’homme mauvais tire le mal de son cœur qui est mauvais: car ce que dit la bouche, c’est ce qui déborde du cœur”  

 

      Pour Jésus la Bonne Nouvelle se répand à partir du coeur: dire que “le royaume de Dieu est proche”, et dire que ce royaume “est intime, dans le coeur”, c’est la même chose. Le chemin de la conversion, avant d’aboutir à Dieu, passe par le coeur. Pour la science moderne, le coeur n’est qu’un organe qui sert à pomper le sang. Pour les poètes et les amoureux, le coeur est la plus belle métaphore de l’amour. En fait, quand nous éprouvons un sentiment, le coeur bat plus fort. Pour les psychologues, ça n’a aucun sens parler de “méchanceté”: la méthode scientifique ne connaît pas d’évaluation morale, ce n’est pas son domaine, elle doit demander à l’anthropologie et à l’éthique les critères qui justifient ses recherches. Tout au plus, la psychologie osera dire que quelqu’un est “malade”, mais pas “méchant”. Pourtant la méchanceté existe. 

 

      D’autre part, la psychologie est-elle scientifique? Non: la psychologie elle-même est une méthode “humaine”. Parfois, on a même la sensation que les psychologues et les psychanalystes exercent leur activité et communiquent entre eux comme des chamans, des gourous, des prêtres, des initiés. L’homme biblique est bien plus réaliste: le coeur est le lieu où les actions naissent, où le bien se distingue du mal, où l’on choisit la vie ou la mort, où l’on apprend à aimer la vérité, où Dieu nous séduit et nous saisit! L’éthique, la poésie et la psychologie, à elles seules, ne parviennent pas à atteindre ce mystère de bonté ou de méchanceté qu’est le coeur humain!

 

      Un dicton hébraïque raconte que Dieu, au commencement, créa “le point d’interrogation”, et le mit dans le coeur de l’homme: “Adam, où est tu ?” La même question, aujourd’hui, se pose ainsi: “Où est-ce que tu en es? Dans quelle direction es-tu en train de conduire ta vie?” Chaque fois que mon coeur se pose une question, c’est Dieu qui descend dans le jardin de ma vie. Je regarde au fond de moi, et je vois mon désir: je cherche ma “consistance” (Qui suis-je?), mon “orientation” (Quelle direction dois-je prendre?) et mon “aboutissement” (Où est-ce que je vais?). Si je n’aime pas mon chemin, si je ne ne suis pas à l’aise dans le monde, les personnes qui m’entourent vont aussi en souffrir. 

 

      C’est la même question que Jésus pose dans l’évangile de Jean: “Qui cherchez-vous?” Et les premiers mots du Ressuscité sont: “Femme, qui cherches-tu?” Ces sont des questions divines qui contiennent la définition de l’homme: nous sommes des êtres qui questionnent, qui cherchent, nous sommes des points d’interrogation. La réponse se trouve dans la vie chrétienne: “Je cherche le Seigneur, raison de mon existence; pouvoir le trouver est la chose la plus belle de ma vie!”

 

      Tout point d’interrogation révèle un manque: “Quels sont tes désirs, tes vrais désirs?” “Quelle est ta faim, ta soif, qu’est-ce qui te manque?” Tout père, un jour, sera obligé de  poser à son fils cette grande question: “Es-tu content?” C’est là que la parole descend comme l’épée, au point de jonction entre l’âme et l’esprit, là où les bonnes ou mauvaises actions naissent. À ceux qui veulent le suivre, Jésus ne demande pas d’effort, ni de renoncement, ni de sacrifice. La vie n’avance pas par des ordres, par des interdictions ou par des coups de bonne volonté, mais par passion, par attraction, par séduction! Le désir est le moteur de la vie! 

 

      Saint Bernard dit: “approche tes lèvres des sources de ton coeur!” Si tu te connais toi-mȇme, tu sauras aussi ce qui fait du bien aux autres. Pour Olivier Clément, “toute la vie n’est que un pèlerinage vers le lieu du coeur”. De même, Jésus nous demande d’entrer dans le coeur, de le comprendre, de connaître ce qu’il désire le plus. Il y a là une béatitude cachée: “heureux vous qui êtes insatisfaits, vous deviendrez des chercheurs de trésors!” 

 

      Sois donc bon avec toi-mȇme, de sorte que de ta bouche déborde le trésor de ton coeur!    

 

      Amen

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