SOYEZ MISÉRICORDIEUX

 Réflexion sur l’Évangile du dimanche et des Fȇtes 

               Année C -VII Ordinaire (Lc 6, 27-38)                                                         

par André De Vico, prêtre  

correction française: merci à mes amis    

      

   

  “Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux”  

 

      La liturgie insiste beaucoup, peut-être même trop, sur la notion de “tout-puissant’’: “Seigneur Dieu tout-puissant …” Est-il vraiment le “tout-puissant?” Et alors, dans mon problème, pourquoi ne m’aide-t-il pas? Les personnes en difficulté, face à la “toute puissance” divine, éprouvent un certain malaise, voir un sentiment de révolte. Dans l’histoire des religions, nous connaissons le dieu Jupiter, Zeus chez les grecs: ça, c’était un “tout-puissant!” Il siégeait sur le trône de l’Olympe, prêt à lancer la foudre! Les premiers chrétiens arrachèrent à Jupiter les signes du pouvoir, et ont mis la foudre dans les mains de Dieu le Père: le Dieu des chrétiens est bien plus fort que le dieu des romains! Ce transfert de compétences a affecté aussi la prière liturgique. Jupiter a disparu, mais nous nous obstinions à revêtir l’image du Dieu de l’évangile avec des parures qui ne sont pas les siennes. 

 

      En réalité, dans l’Ancien Testament, Dieu n’est pas “le tout puissant”, mais il est plutôt “le miséricordieux”. Cela change beaucoup de choses. S’il faut prendre les textes historiques, littéraires et bibliques, tels qu’ils sont, en acceptant qu’ils ne peuvent pas être modifiés, il serait sage que la prière liturgique soit réexaminé par les pasteurs et les spécialistes de la liturgie. En effet, il faudrait plus insister dans la prière officielle de l’Église, sur la miséricorde de Dieu, pour en faire une prière moins retentissante et plus humaine, plus proche de ceux qui - séance tenante - ne peuvent pas bénéficier de la toute-puissance divine. Mais alors qui est ce “Dieu miséricordieux” de l’Ancien Testament? 

 

      Le mot hébraïque original est: “rahanin”, qui en latin est traduit par: “misericordia”. Je me souviens d’un père spirituel qui spéculait sur ce mot de “misericordia”: la miséricorde divine est Dieu qui s’apitoie sur “les misères (miseri-) de mon coeur (-cordia)”. En réalité, contrairement à la langue latine, dans le mot “rahanin” ce n’est pas le “coeur”, mais c’est l’“utérus” qui bouge, ce sont les “entrailles maternelles”. Il serait donc plus exact de traduire “rahanin” par: “ventre maternel”. Cela fait penser au processus vital qui se passe chez femme, quand elle accueille un grain de vie et elle en rend le fruit. Dire “misericordia”, à la manière latine, ce serait trop peu. On dirait la copie d’un électrocardiogramme qui fixe la vie en un instant précis. 

 

      En effet, pour une mère, qu’est-ce qui est le plus difficile à porter? “Le poids” d’un fils, ou “le souci” qui pèse sur la vie d’un fils? Dieu est miséricordieux parce que il est comme le “ventre d’une mère”: il alimente, il soutient et il encourage la vie. Il est “enflé de vie”. Donc, pour approcher les personnes en difficulté, il nous faut un coeur robuste, le coeur d’une mère: il faut comme un utérus, comme le ventre d’une mère. 

 

      Les psychologues modernes, tout au début de leur science, ont concentré leur attention sur l’utérus (ὑστέρα) de la femme, pour étudier ce qu’aujourd’hui encore on appelle “comportements hystériques”. Dans la forêt du mystère féminin, ils ont détecté et classifié les herbes toxiques, mais on dirait qu’ils ne se sont pas donné la peine d’atteindre le “proprium” de la femme: l’accueil, le nutriment, le soin et la thérapie de la vie. La psychanalyse est mal-née: ignorant la valeur de la femme, pouvait-elle saisir celle de la mère? Pourquoi les féministes d’aujourd’hui sont si peu maternelles, et si peu féminines? En termes équivalentes: comment un peuple si patriarcale et si machiste comme l’hébraïque, a pu concevoir un sentiment si viscéralement, féminin et maternel, chez le Dieu des anciens pères?  

 

      Nous devons l’admettre: Dieu n’est pas “le tout puissant”, dans le sens qu’il gouverne le monde avec les attributs et les ornements de Jupiter, mais il est présent, avec le sentiment d’une mère: il n’oublie pas, il accompagne, spécialement le fils qui souffre! Et alors, au lieu de demander à Dieu pourquoi il ne descend pas sur terre, afin d’y déployer sa toute puissance, nous ferions mieux de suivre le conseil de Jésus: “Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux”. La réponse que Dieu offre à ceux qui souffrent, c’est nous !

 

      Amen

 

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