LE PROPHÈTE PAS LE BIENVENU

Réflexion sur l’Évangile du dimanche et des Fȇtes 

               Année C -IV Ordinaire (Lc 4, 21-30)                                                         

par André De Vico, prêtre

 correction française: merci à mes amis 

 

 

      “Ils poussèrent Jésus hors de la ville, et le menèrent jusqu’à un escarpement de la colline, pour le précipiter en bas”  

      

      Après un début plein de succès, la prédication de Jésus s’arrête à Nazareth, sa patrie adoptive, petite ville où il avait grandi et les gens pensaient le connaitre. Le jour du sabbat il se rend à la synagogue, se lève, fait la lecture et la commente. La stupeur initiale des concitoyens qui l’écoutent se transforme en refus: il murmurent contre lui, il cherchent même à le tuer, en le poussant du haut du précipice. Qu’est-ce que Jésus a dit de si grave, pour susciter tant de fureur? C’est vite dit. En lisant Isaïe 61, 1-2, Jésus attire l’attention sur lui: ce prophète dont Isaïe parle, “c’est moi!” Cette  déclaration d’Isaïe si ancienne, elle se passe “aujourd’hui”, “par moi!” Jusque-là, la réaction se limite à la surprise, mais ensuite, ce qui va empirer la situation, c’est que Jésus précise la mission de ce prophète: “évangéliser les pauvres, et proclamer l’année jubilaire du Seigneur”. 

 

      Le Jubilé hébraïque était fixé tous les cinquante ans pour annuler les dettes, libérer les personnes qui étaient vendues comme esclaves par les usuriers, et rendre la propriété des terrains confisqués aux anciens propriétaires. C’était une sorte d’“amnistie générale” qui devait relancer la société, par le moyen d’une restauration spéciale de la justice. Á cause d’une mentalité religieuse très enracinée, on croyait que seules les personnes sans défaut physique pouvaient accéder à la Synagogue, au Temple et au Culte. Tous les autres, aveugles, estropiés, boiteux, déficients, fous, handicapés et quiconque avait été affecté par une maladie ou une “impureté” n’était pas admis dans la communauté cultuelle. Mȇme les vieillards qui n’arrivaient pas à tenir debout étaient tenu dehors à l’écart, parce que “des anges sont dans la communauté”. L’imperfection est indigne des anges! Jésus bouleverse la manière de penser de ses compatriotes, en disant que la justice ne consiste pas à l’accomplissement précis d’une Loi ou d’un Culte, mais en sa personne: il est lui le prophète annoncés par les textes qu’il vient de lire, qui porte la bonne nouvelle aux malades et aux pauvres!

 

      La goutte qui fait déborder le vase survient au moment où Jésus rappelle à ses concitoyens que, au temps d’Elie et d’Élisée, malgré le fait qu’il y avait beaucoup de  pauvres femmes et de lépreux  en Israël, les deux prophètes furent envoyés à des étrangers: à la veuve de Sarepta, très pauvre, et à Naaman le Syrien, un notable païen frappé par la lèpre. En d’autres termes, “chers concitoyens, “Dieu vous a relégués au deuxième rang!” Avec la venue de Jésus, une nouvelle année jubilaire commence, une justice toute nouvelle qui a pour protagonistes les pauvres, et pas chaque cinquante ans seulement, mais chaque jour! Pas en Israël seulement, mais partout! 

 

      Luc place cet épisode tout au début de la vie publique du Christ, pour souligner le refus de Jésus par les Juifs, refus qui aboutira trois ans plus tard à l’arrestation, la condamnation et la crucifixion de Jésus à Jérusalem. Cependant, nous ne devons pas penser que ce refus ne soit imputable qu’à ces gens-là, qu’à cette génération de Juifs là. En fait, il s’agit d’un durcissement qui opère en tout lieu et en tout temps. De nos jours également même si le Christ est admiré en tant qu’homme, il est rejeté en tant que prophète de Dieu. Si je vais à la télé pour dire que je crois en Dieu, personne ne fait de cas, mais si je dis que Jésus est le Fils de Dieu, je serai impliqué dans le mystère de son refus.

 

      Parfois, à nous les catholiques, on reproche de lire et répéter toujours les mêmes histoires. En réalité, si il y a l’Esprit Saint, les paroles que je lis dans l’Evangile, se passent “aujourd’hui”. Une page de l’Écriture est bien plus actuelle que le journal d’hier, lequel a déjà fini à la poubelle. 

 

      Amen

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