LE TRAVAIL DE LA TENTATION

Réflexion sur l’Évangile du dimanche et des Fêtes

               Année C - I de Carȇme (Lc 4, 1-13)                                                            

par André De Vico, prêtre

correction française: merci à mes amis

 

 

      “Jésus, rempli d’Esprit Saint … quitta les bords du Jourdain; dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable …”   

  

      Satan n’a pas de queue, ni de cornes, comme nous nous le représentons: il se présente plutôt comme un personnage fascinant, avec un costume élégant, un regard perçant, capable de lire mon cœur, mais sans pouvoir lire dans le sien. Tout le contraire de Jésus, qui lit, et se laisse lire. En le rencontrant dans le désert, pour dissiper un doute, Satan lui pose une question: “es-tu le Fils de l’Eternel?” En effet, d’après son estimation, dans le monde c’est lui qui commande: que vient donc faire ici le Fils de Dieu? Les hommes ne comprennent que l’argent, le pouvoir et le luxe. Tout au plus, si Jésus veut conquérir les hommes, il doit s’allier avec lui.  

    

      “Jésus, tu es jeune et beau: pourquoi tu ne commences pas par la femme? C’est par elle qu’il faut commencer, comme moi je l’ai fait tout au commencement, quand je l’induis à la désobéissance. J’aurai du la conseiller d’une autre façon, j’aurai pu en faire un meilleur instrument pour vaincre Dieu, mais j’étais trop pressé et j’ai failli. Alors, mon cher, profite de mon expérience, écoute-moi, choisis pour toi une compagne, et là ou tu n’arriveras pas, elle va y arriver. Adam eut son Eve, et toi pourquoi pas la tienne? Tu sais pourquoi l’homme aspire à la richesse et à la puissance? Pour posséder la femme, et la montrer aux autres comme trophée de sa réussite! De son côté, la femme est comme l’alouette, elle n’est attirée que par le scintillement des bijoux, par la force virile, par l’uniforme. Tous les maux du monde, tous les milles délits aux différents visages, sont provoqués par la faim féminine de posséder l’objet. L’âme d’une femme est toujours brulée pas un désir que l’homme ne satisfait pas, ou ne satisfait plus. Va chez la femme, si tu veux savoir qu’est-ce que c’est que la vie!        

 

      Mais ces arguments, avec Jésus, ne fonctionnent pas; ils sont clairement faux, la femme n’est pas du tout cette harpie vorace que Satan décrit! Jésus estimera la femme d’une manière surprenante et positive, on le verra. Malheureusement, beaucoup d’hommes pensent à la manière de Satan, et agissent en conséquence. Comme l’argument n’a pas d’emprise sur Jésus, Satan cache sa crise de nerfs et change de ton: “Ah, stupide que je suis! Tu as faim, et je te parle de la femme! Après quarante jours de jeûne, un homme peut-il penser à la femme? Et alors, regarde ces pierres: si tu es le Fils de Dieu, transforme-les en baguettes de pain, et rassasie-toi!” Jésus réponds sèchement: “Tais-toi, l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu”.

 

      Satan voit qu’il n’arrive pas à le faire plier, il brûle de rage, il serre les dents. “D’accord, tu es au dessus des nécessitées matérielles, et ça te dégoûte de te servir de moi. Je le méritais. Alors, viens ici, et regarde ce qu’il y a dans le Temple. Même les prêtres, règlent leurs transactions avec la chair. Ce sont des hommes, et pas des anges. Fais un miracle spirituel. Jettes-toi du haut du Temple, car il est écrit que si cela arrive, des anges viendront soutenir ton pied. Alors ils t’emmèneront dans la cour principale, devant une foule qui t’adorera comme une popstar. Il est nécessaire qu’ils te voient faire des choses merveilleuses: c’est cela qu’ils veulent!” La réponse de Jésus est d’autant plus forte: “Tais-toi, il est encore écrit: tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu”. 

 

      Satan est au bord du désespoir, il sait bien qu’il est au bout du rouleau, et il tente sa dernière chance. “Mon cher ami, tu sais bien que mȇme une glorieuse apparition de ta personne ne changera pas grand-chose. Le Temple restera un lieu de marché et de corruption. Tu sais bien que le cœur des ministres de Dieu est un nid de vipères qui dévorent et s’entre-dévorent, pour cultiver leur pouvoir. Alors viens, adore-moi, je te donnerai tous les royaumes de la terre! Tu seras le maître du  peuple, des puissants, et même des prêtres! Mais toi, adore-moi juste un instant! Soulage cette soif d’être adoré, cette soif qui m’a perdu pour toujours! Cette soif qui est mon enfer! Un instant seulement, ȏ Christ, toi qui est bon! Un instant de joie à l’éternel tourmenté! Fais-moi sentir ce que c’est qu’être Dieu, et tu m’auras comme dévoué serviteur, pour toujours! Rien qu’un instant, et après je ne te dérangerai plus!” Satan se met à genoux, en le suppliant. 

 

      Ce besoin d’être adoré, exprimé par Satan, ressemble tant à des avances maladroites de type sexuel. En effet, il n’est pas dit que toute manifestation sexuelle soit honnête. Comme toutes les choses de la vie, le domaine sexuel a besoin de discernement. Il ne faut pas induire, ou laisser croire aux jeunes, que tout est possible, tout est faisable, tout est béni. Jésus se lève, il est devenu plus maigre en ces jours de jeûne, il montre un visage sévère: “Arrière, Satan! car il est écrit: C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte”. Et Satan, avec un cri de tourment et de haine indescriptible, se lève d’un bond, et disparait, en laissant derrière lui un hurlement de malédiction. Jésus s’assoit, épuisé, il transpire. Des anges viennent le réconforter, en soufflant sur sa fatigue. Il ouvre les yeux et il sourit, d’une joie qui n’est pas de ce monde ! 

 

      La morale de cette histoire est que Satan se présente avec un habit de bien, avec un aspect commun. Si les gens sont attentifs, et ont des contacts spirituels fréquentes avec Dieu, ils ressentent sa présence, et spontanément se disposent à lutter. Mais si les personnes sont complètement négligentes par rapport au divin, distraites par les commerces charnels, pas aidées par la prière, elles apercevront difficilement le piège, et pourront y tomber. Se libérer sera plus difficile. Satan commence par les voies les plus simples et communes. La partie du ventre et du sexe conquise, il s’attaque au côté moral de la personne: la superbe et la convoitise. À la fin, il s’installe sur la partie la plus noble de la personne: son esprit, en lui arrachant tout respect et considération de Dieu. Á ce point-là, l’homme se livre à Satan corps et âme.     

     

      Comment réagir? Comme Jésus: silence, et prière! La séduction de Satan nous vient comme un taon ennuyeux. Il faut la subir sans impatience stupide, ni crainte vile. Il est bien inutile de se mettre à discuter avec Satan, ou se lancer dans une série de questions car il est dialectiquement subtil. Les arguments ne lui manquent pas: “la femme est tentatrice, l’Église est corrompue, la politique est une chose sale”. Satan connait parfaitement la psychologie humaine, les Écritures Saintes, et la politique internationale, tout en les utilisant pour répondre à ses desseins. Il n’y a que Dieu qui puisse lui répondre, car il a une dialectique supérieure à la sienne. Pour cette raison, dans la tentation, il faut recourir à Dieu, en faisant pour que Lui parle pour nous. Il faut répondre à Satan avec un minimum de paroles, toujours droites, tirés des Écritures, et jamais avec des argumentations humaines. Quand il insinue être comme Dieu, il faut lui jeter au visage, sans peur, avec l’Écriture, que ce n’est pas vrai. Satan ne le supporte pas. Après la lutte, la victoire, et les anges viendront nous réconforter comme un vainqueur. 

 

      Cf. Maria Valtorta, “L’Evangelo come mi è stato rivelato”, vol. I 46, 3-15, CEV, Isola Liri 1993                                                                                                                                     

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