LE CARȆME, TERRE DU MILIEU

Réflexion sur l’Évangile du dimanche et des Fêtes

Année C - Mercredi des Cendres (Mt 6,1-6.16-18)

par André De Vico, prêtre

correction française : merci à mes amis

 

 

       “Le Sacrement que nous allons recevoir, ô Père, nous soutienne dans le chemin du Carême, qu’il sanctifie notre jeûne, et qu’il le rende efficace pour la guérison de notre esprit”

    

      Le Carême est un chemin vers Pâques. Toute la vie dans son ensemble, est un long Carême vers la Pâque éternelle. Au long du parcours, on tombe sur des difficultés, des obstacles, des épreuves, des tentations, comme dans la “Terre du Milieu” du “Seigneur des Anneaux”. De fait, d’après les évangélistes, le désert que l’on traverse en cette vie, n’est pas tant un “désert”, mais plutôt un lieu … bondé! Le temps de rester tranquille, en paix, n’y existe pas. D’abord, nous avons la compagnie des bêtes sauvages qui, dans l’allégorie des Pères de l’Église, sont les passions, laborieusement apprivoisées par l’homme spirituel. Puis, il y a l’œil de Satan, avec toute sa cour d’ogres et de mauvais esprits. Le service des anges sera le repos bien mérité du guerrier, à la fin de son combat, après avoir dépassé les épreuves et les diverses tentations. 

 

      Mais où se trouve donc cette “Terre du Milieu”? Est-ce dans un lieu fantastique d’un lointain passé? Non, en réalité, cette “Terre du Milieu” s’étend au fond de nous, c’est nous, c’est notre chair, notre humanité. Elle est un espace entre le monde animal et le monde spirituel, entre anges et démons. Peut-être est-elle-même ce pays que la vie nous demande de découvrir?

 

      La tentation économique de l’homme consiste en une satisfaction sordide du ventre et de la sensualité, le matérialisme du commerces et des affaires. La tentation spirituelle, quant à elle, cherche l’orgasme dans une religion spectaculaire, miraculeuse, fausse, faite pour impressionner les autres, pour enchanter les foules et manipuler les confréries religieuses et les groupes de prière. La tentation politique pousse l’homme à renoncer à sa dignité, en rampant devant quelqu’un de mieux placé que lui, pour atteindre une position riche de privilèges, par rapport à d’autres assis au bas de l’échelle. Dans le désert, Jésus répond d’une manière catégorique et brusque aux trois tentations du pain (le pouvoir économique), du temple (le pouvoir religieux), et de la royauté de la terre (la pouvoir politique). Ces sont les tentations les plus évidentes, mais Jésus a été mis à l’épreuve “en toute sorte de tentation”. 

 

En soi, l’économie, la religion et la politique ne sont pas mauvaises, ce sont des services, mais l’homme a cet horrible pouvoir de les dégrader, de les pervertir. Son œil est fasciné par le pouvoir de l’Anneau (Satan, le “Big Brother”) contre lequel il faut lutter, pour s’y soustraire! Si nous pensons comme Satan, nous n’aurions pas de peine à trouver des arguments pour lui donner raison: “la femme est tentatrice, l’Église est corrompue, la politique est une chose sale”. Mais si nous pensons comme Jésus, tout change: “si ton œil est limpide, ton corps tout entier sera dans la lumière” (Mt 6, 22). Tout dépend donc de mon regard sur les choses, non du regard de Satan.

 

      Le chemin du Carême, avec ses jeûnes, ses pénitences, permet de rendre mon regard plus limpide. Je ne peux pas entrer en bataille avec les ogres l’estomac plein, ou les armes émoussées. Le jeûne augmente mon état d’alerte, et la pénitence a l’effet des coups de marteau sur l’enclume qui forge l’épée du guerrier. Après la lutte dans le désert, les tentations surmontées, voici le miracle: Jésus qui était en compagnie des bêtes sauvages et des démons, reçoit le très précieux service des anges! Après la lutte et la victoire, les anges s’inclinent pour soutenir le vainqueur: “le repos du guerrier!” 

 

      Le disciple qui reste fidèle à son Maître est impliqué dans la même dynamique, dans le même désert, dans la même compagnie, avec les mêmes tentations, la même “Terre du Milieu” (sa chair, son humanité), au delà desquelles, il apparaȋt dans toute sa valeur. De fait, je ne peux pas servir l’Église, ou servir le monde dans une action de bénévolat, si auparavant je n’ai pas reçu le réconfort des anges, ayant surmonté les épreuves qui font de moi un homme, une personne consciente du rôle qui va jouer. Il n’y a que la personne éprouvée, qui puisse faire du bien en faveur des autres! Ce sera le meilleur fruit de notre Carême!    

 

      Amen

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